Retour à Domme | Françoise Houdart

Le Périgord, c’est si beau en été, mon petit. Une terre de bonté et de saveurs. Une terre d’amour. J’y ai vécu de beaux moments, soleil au cœur et bottines aux pieds. [p. 15]
DANS CE RETOUR À DOMME, son dernier roman, Françoise Houdart m’a entraînée sur les chemins du Périgord, cette région qui m’est chère et où j’ai tant de souvenirs, comme la grand-mère du narrateur. Il m’a été très agréable de retrouver la Dordogne, « parfois très tourmentée ; [qui] fait sa capricieuse dans les cingles » [p. 71], au détour d’un pont, de me promener avec Oscar parmi les bastides et les champs, ou encore de saliver à l’évocation des vins et de la cuisine. L’évocation ne s’adresse pas seulement aux habitués de la région, loin de là, tout est assez bien expliqué, voire détaillé, comme un guide le ferait pour des touristes.
- Bah ! Tout le monde sait bien que les dieux menaient grande vie au Périgord, ici surtout, au Périgord rouge, celui des vignobles, des grands crus et des moins grands. On attrape la cuite rien qu’à lire les noms des localités sur les panneaux indicateurs : Bergerac, Rosette, Pécharmant, Monbazillac… Ah ! Quel beau pays ! [p. 24]

Bien qu’il joue un rôle dans l’intrigue, le Périgord reste un cadre du roman, qui s’efface peu à peu au profit de l’histoire. Une nouvelle fois, Françoise Houdart joue du mystère, l’entremêle à la réalité : on se demande longtemps si le récit basculera dans le fantastique, ou s’il s’agit simplement de fantasmes du narrateur, marqué par la légende de la Coulobre (dragon de la Dordogne). Il faut dire qu’Oscar admet lui-même gamberger facilement, avoir « tendance à renchérir sur les faits les plus banals, les circonstances anodines » [p. 50]. Parti sur un coup de tête à la recherche du passé de sa grand-mère, sur la base d’une photographie et d’une ultime confidence, il est un doux rêveur, un personnage touchant.
Elle a envie de dire tout cela à ce garçon qui court, lui aussi, derrière un rêve. Lui dire que ce qui compte vraiment, c’est de rêver. Et de désirer. Envie de lui dire que ce qui le fait marcher, courir, pleurer, c’est le désir. Que c’est le désir qui donne le goût d’aborder chaque matin après chaque petite mort nocturne. Et qu’on meurt de ne pas désirer s’éveiller… [p. 157]
Les autres personnages ont aussi de quoi faire vibrer la corde sensible du lecteur et un caractère bien marqué. Parmi ceux-ci, les femmes m’ont semblé plus nuancées, cachant de sombres secrets. Le seul reproche que j’adresserais à l’ensemble des personnages est leur côté très expansif : ils se livrent les uns aux autres d’emblée, tout en étant de parfaits inconnus. J’ai eu beaucoup de mal à adhérer à cette forme de narration et de mise en place de l’intrigue par les dialogues. Il y a là quelque chose de trop confiant, trop « beau »* pour me convaincre tout à fait dans les premières pages du roman.

Un roman agréable et touchant, à la poursuite d’un rêve.

* L'article du Carnet et les instants, paru aujourd'hui, vient apporter une belle réponse à mon bémol : « Et si tout cela est trop beau pour être vrai, laissons nous emporter car de nos songes naîtra, peut-être, le meilleur de nous-mêmes. » [Michel Zumkir, Oscar et les oiseaux, sur Le Carnet et les instants]

NOTE | Autour de Françoise Houdart : pour notre dernière lecture commune du mois, Anne est quant à elle restée dans nos contrées belges, celles des Profonds chemins de Victor Regnart.

Françoise Houdart - Luce Wilquin

Retour à Domme de Françoise Houdart

Luce Wilquin (Avin), coll. Sméraldine, 2016 – 1re publication

* Le mois belge d’Anne et Mina *

8 commentaires:

  1. C’est le bouvreuil sur la couverture qui a attiré mon regard…

    Ah le Périgord. Quelque magnifique région ! Et la vue de la Dordogne depuis Domme. Et Beynac face à Castelnaud… La grotte de Combarelle encore. Puymartin, le château de Fénelon, et tant d’autres lieux magiques encore…

    http://epigrammeoeil.blogspot.de/2014/08/beynac-et-castelnaud-lhistoire-dune.html

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    1. Belle couverture, n'est-ce pas ? Je vois que nous partageons l'amour de cette région, j'ai bien sûr visité Beynac, Castelnaud et tant de châteaux, dont celui de Fénelon, il n'y a pas si longtemps, et la tour de Montaigne. Je ne suis jamais allée à Domme en revanche.

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    2. J'aime aussi beaucoup les ruines du château de Commarques. Sinon, pour Domme, voici une vue prise depuis la place qui domine la vallée...

      http://img15.hostingpics.net/pics/219967P1000315.jpg

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    3. Ah oui, superbe vue... Je connais mieux celle depuis Trémolat, assez similaire dans les paysages.

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  2. Ca me fait frissonner, ces histoires d'oiseaux fracassés évoquées dans l'article du Carnet et les instants. Je ne suis allée qu'une fois dans le Périgord, très belle région !

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    1. L'image de ces oiseaux est assez horrible, oui, mais je te rassure, ça ne l'est pas dans le roman de Françoise Houdart, il y a au contraire de la douceur dans une des scènes (inspirée d'un évènement réel).

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  3. Je me doute bien qu'à l'évocation de cette région, tu ne pouvais qu'être séduite :) Et encore plus venant de cette auteure chère à ton coeur! Il me semble dépaysant ce roman, ça me plaît :)

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    1. C'est vrai que je partais déjà avec deux a priori positifs et étais ravie d'apprendre le cadre de ce nouveau roman de Françoise Houdart. J'ai passé un bon moment, dépaysant et avec un petit goût de vacances.

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