LA FEMME MOSAÏQUE de Claire Ruwet m’a d’emblée rappelé Alice et l’homme-perle de Valérie Cohen, également paru en début d’année 2014. Éliane, comme Alice, est à la recherche d’un homme de son passé, un « homme-loup », dont le souvenir l’a poursuivie des années durant. Elle laisse derrière elle sa famille – mari, enfants et petits-enfants –, le temps d’un voyage en Espagne et d’un retour en arrière. Dans un style vif et dialogique, Claire Ruwet raconte les rencontres qui s’ensuivent et participent à la reconstruction intérieure de son héroïne.
L’originalité du roman tient sans doute à l’univers futuriste déployé en tant que cadre du récit. Ce monde en grande partie virtualisé et modernisé semble dans la lignée du nôtre, tout au plus accentué ; il étonne donc par certains termes (le métro est devenu un fuseau solaire, et les cartes postales véhiculent des senteurs ou des goûts, en plus des images, pour ne citer que ces deux exemples), sans dépayser tout à fait. Le contraste avec la profession de mosaïste d’Éliane et de ferronnier de son mari est encore accentué dans un tel contexte et nous les rend tous deux plus proches. Une grande sensualité les caractérise, un besoin de travailler les matières, de toucher les choses et les gens. Enveloppante, l’écriture de Claire Ruwet transmet cette sensualité par l’attention aux sensations et aux gestes, ainsi que par la sollicitation de l’ensemble des sens du lecteur : la mosaïque est par exemple autant évoquée par ses bords coupants qui viennent abîmer les mains que par ses couleurs ou l’harmonie de ses formes, suscitant le souvenir d’un moment au bois, riche de senteurs, de goûts et d’odeurs.
C’était l’été. Odeur d’herbe sèche. Hector avait lâché sa main pour cueillir une fraise des bois au bord du chemin. Puis il s’était retourné vers elle, le regard incandescent. Lentement, il avait approché ses lèvres des siennes et, dans un baiser, avait déposé la fraise sa langue.
La saveur aigrelette et granuleuse du fruit revient titiller ses papilles, intacte. Rouge vif, voilà la solution. [p. 12]
Un roman féminin sensuel.
Encore une lecture originale, tu as dû prendre plaisir à goûter cette écriture et cette sensualité, annoncée par la belle couverture.
RépondreSupprimerUne lecture que je n'imaginais pas si originale, j'ai été assez déstabilisée par l'univers futuriste dans un premier temps, puis la sensualité du récit m'a entraînée dans son sillage.
SupprimerLa peinture de couverture est l'oeuvre de Béatrice Graulich-Vandeputte.
SupprimerCet univers futuriste m'a été inspiré par l'architecture de Gaudi. Après avoir écrit un récit de vie ( Blanc foncé, publié chez Couleur Livres) et un recueil de poésie (Mon présent est ailleurs publié chez Le Coudrier) racontant les origines africaines et belges de mes enfants métis, je souhaitais d'emblée utiliser toutes les ressources que la littérature de fiction recèle, y compris celle d'un univers imaginaire.
SupprimerMerci pour ces deux réponses ! Je n'avais plus le livre sous la main pour citer l'artiste qui a réalisé la couverture. En ce qui concerne cet univers imaginaire, c'est intéressant de lire que vous ne l'avez pas "surexploité", il reste un cadre en retrait dans l'intrigue, sans l'influencer vraiment, en tout cas d'après ma lecture.
SupprimerJe suis très intriguée par ce roman. Je note.
RépondreSupprimerJ'espère qu'il te plaira.
SupprimerLa couverture est très jolie! Le côté fantaisiste pourrait me faire reculer, tu me connais, mais s'il ne t'a pas plus destabilisée que cela, je suis rassurée.
RépondreSupprimerJe pense que c'est un roman qui pourrait te plaire, malgré le côté fantaisiste : il reste vraiment un cadre en arrière-plan, à mes yeux, et l'histoire est de celles qui te touchent, me semble-t-il.
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