Combien sommes-nous à vivre sans en parler à personne ce double deuil qui nous ébranle et nous fragilise par la violence des sentiments qui nous animent soudainement ? Combien d’entre nous se sentent-ils emportés par des vagues d’émotions souvent inavouables ? Comment oser raconter à quiconque ce désordre des sentiments, ce méli-mélo de rage, d’oppression, de peine infinie, d’irréalité, de révolte, de remords et d’étrange liberté qui nous envahit ? [p. 9]
COMMENT vider la maison de ses parents ? Comment recevoir un héritage, se sentir légitime en tant qu’héritière légale ? Ce sont deux questions, parmi toutes celles que posent le deuil, que Lydia Flem aborde dans son récit, après la mort rapprochée de ses parents. Elle dit avec pudeur les émotions qui la submergent successivement, parfois simultanément, et dont notre culture a souvent fait un tabou. Le deuil ne s’affiche plus dans l’espace social, est relégué à la sphère strictement privée et se vit seul, chacun à sa manière. Pour Lydia Flem, vider la maison de ses parents, sans faire appel à un brocanteur, sera l’une des étapes qui lui permettra de ses réconcilier avec ses morts.
Pesait sur moi une question insistante : que devais-je faire du contenu de leur maison, de ceci et de cela ? Étais-je réellement libre de choisir ? La loi m’offrait en pleine priété un monde qui était encore le leur. Pour chaque objet, chaque meuble, chaque vêtement, chaque papier, il n’y avait que quatre directions, comme à la croisée des chemins la rose des vents : garder, offrir, vendre ou jeter. [p. 41]
À chaque objet s’associe un choix, mais aussi un souvenir, une odeur, une évocation du parent qui l’a conservé. Petit à petit, l’auteure parviendra à s’en détacher – ou à tout le moins à détacher le souvenir de l’objet pour ne garder que le premier – et choisira de leur donner une nouvelle vie, en accord avec ce que ses parents auraient souhaité, puis progressivement en accord avec elle-même.
Tout en témoignant de la façon dont elle a vécu ce deuil, Lydia Flem apporte à son texte des éléments théoriques, issus de son métier de psychanalyste. Cela reste discret, mais est la touche d’objectivité qui permet à chaque lecteur de se retrouver dans son récit, peut-être d’y trouver des réponses personnelles.
Comment j’ai vidé la maison de mes parents de Lydia Flem
Points (Paris), coll. La librairie du XXIe siècle, 2013
1re publication (Le Seuil) : 2004
* Prêt de Laeti *
* Projet non fiction *
Points (Paris), coll. La librairie du XXIe siècle, 2013
1re publication (Le Seuil) : 2004
* Prêt de Laeti *
* Projet non fiction *
Alors j'écrivais un com' quand j'ai dû tomber dans un trou noir parce que la page n'est plus ouverte :S
RépondreSupprimerBref, ton dernier paragraphe correspond bien à mon souvenir du livre (le reste aussi évidemment mais cela relève plus du "descriptif" que de "l'analyse" comme ta conclusion).
Ravie de redécouvrir ce livre sous ton regard.
En effet, aucun autre com' reçu à part celui-ci. :/
SupprimerMerci pour ton passage et de m'avoir donné envie de lire cette auteure surtout. Je compte poursuivre avec le titre dont je t'avais parlé l'an dernier ; peut-être plus tard pour la suite de cette trilogie autobiographique.
Marquise.... .... ....
RépondreSupprimerAs-tu aimé ? C'est quasiment sûr que je le lirai en avril (sauf changement d'avis plus que probable de blogueuse girouette...) ;-)
RépondreSupprimerJe saurai te rappeler à cette lecture en avril ^^ J'ai aimé, oui ; je craignais vraiment la dimension psychanalytique, mais elle apporte un éclairage intéressant et ne domine pas le témoignage. L'auteure a une écriture très agréable à lire.
SupprimerCe projet de sortir des voix nouvelles de ma PAL va me donner de belles surprises, j'en suis sûre ! Je viens de découvrir Fanny Chiarello, pas sortie de la PAL, plutôt toute fraîche de chez le libraire, mais quel bonheur...
SupprimerJe te le souhaite en tout cas ! Je suis plutôt confiante en ce qui concerne Lydia Flem et attends de découvrir Fanny Chiarello chez toi.
SupprimerUn titre que j'avais déjà repéré et qu'il me tarde de lire. Ton avis m'incite un peu plus à me le procurer :-)
RépondreSupprimerTant mieux ! Je suis sure qu'il te plaira également.
SupprimerUne seule question me vient: n'est-il pas trop "triste" ce livre? Le sujet n'est pas des plus drôles...
RépondreSupprimerCe que je chercherais plutôt dans cette lecture est la beauté des souvenirs, et la nostalgie. C'est en tout cas ce qu'avait éveillé en moi ce titre. Quoi qu'il en soit, je le programme pour le prochain Mois belge! Biz
Comme tu le dis, le sujet est assez triste et peut raviver des souvenirs douloureux pour ceux qui ont vécu un tel moment. L'auteure ne cherche pas à tirer des larmes non plus, cela reste pudique. Il y a une part de nostalgie (et de beaux passages dans cette tonalité d'ailleurs), tu y trouveras sans doute ce que tu recherches, mais pas seulement.
SupprimerJ'ai aimé ce livre. Un deuil, ce sont aussi ces gestes concrets à poser, ces questions, ces choix - "garder, offrir, vendre ou jeter".
RépondreSupprimerC'est en cela que je l'ai trouvé intéressant, par l'énoncé narrativisé des étapes d'un deuil, des gestes et rituels qui permettent de le traverser.
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